Après deux ans de détention, le jeune pianiste de jazz Alon Ohel a été remis lundi aux autorités israéliennes avec les dix-neuf autres otages vivants libérés par le Hamas dans le cadre de l’accord de paix conclu avec Israël. Selon sa famille, le musicien de 24 ans a pu, pour la première fois depuis 727 jours, poser les mains sur un piano. Mais il souffre d’une altération de la vision de son œil droit, conséquence probable de sa longue captivité.
En septembre dernier, une vidéo diffusée par le Hamas avait redonné espoir à sa famille. On y voyait Alon Ohel s’adresser directement au Premier ministre Benyamin Netanyahou, l’exhortant à obtenir la libération de tous les otages encore retenus à Gaza. Ces images, rares et bouleversantes, ont précédé de quelques semaines une issue que ses proches n’osaient plus espérer.
Lundi matin, la nouvelle de sa libération a fait le tour du pays. « C’est un miracle », a déclaré sa mère à la chaîne Channel 12, les larmes aux yeux. À l’hôpital Beilinson de Tel Aviv, où il a été pris en charge dès son arrivée, Alon a retrouvé un piano installé dans sa chambre. « Il a joué quelques notes, très doucement. Les premières depuis deux ans », a-t-elle raconté.
Originaire de Serbie, Alon Ohel vivait dans le kibboutz de Rimon, en Basse Galilée, où il s’apprêtait à entamer des études de musique à l’automne 2023. Mais le 7 octobre, sa vie a basculé. Présent au festival Supernova de Re’im, près de la bande de Gaza, il a été capturé lors de l’attaque terroriste du Hamas. Depuis, son nom figurait parmi ceux des disparus dont les portraits ornaient la « place des otages » à Tel Aviv.
Pendant ces longs mois, sa famille a multiplié les initiatives pour maintenir son souvenir vivant. Sa mère venait régulièrement jouer sur un petit piano jaune, symbole de résistance et d’amour maternel, tandis que son frère Ronen, également musicien, a mobilisé de nombreux artistes israéliens et internationaux.
Parmi eux, le contrebassiste et compositeur de jazz Avishai Cohen, qui a enregistré au domicile familial la chanson Shuvi Elay (« Reviens-moi »), dédiée à Alon. Le morceau est devenu, pour beaucoup, un hymne d’espérance.
Le monde de la musique classique s’est lui aussi mobilisé. En mars dernier, à Tel Aviv, Martha Argerich a dédié l’un de ses récitals au jeune pianiste, aux côtés du baryton Matthias Goerne et sous la direction de Lahav Shani. « Nous voulions rappeler qu’un musicien, quelque part, privé de lumière et de sons, attendait de pouvoir rejouer », avait alors confié la grande pianiste argentine.
S’il doit désormais entamer une longue convalescence, notamment pour soigner son œil droit, Alon Ohel a déjà retrouvé le geste essentiel : celui de jouer. Ses proches espèrent que la musique l’aidera à reconstruire ce que deux années de silence ont brisé.
« Il a dit que les touches lui paraissaient plus froides qu’avant, mais qu’elles sonnaient encore », a confié son frère Ronen. Et d’ajouter, ému : « C’est le son de la liberté. »